Les 29 et 30 août, le réseau ACIDD a organisé la 14e Université de l’Eté de la communication pour le développement durable au Marché des Douves à Bordeaux.
Pour cette 5ème édition, la réflexion était portée sur la thématique « Lost in Transition » qui a permis de mettre en lumière les différentes transformations énergétiques, écologiques et numériques que subit notre monde à l’heure actuelle.
Retour non exhaustif sur les différentes tables-rondes du 29 août.
11h00 – Ouverture avec Vincent Baholet, Président d’ACCID – délégué général de la fondation FACE, Gilles Berhault, délégué général d’ACIDD, Anne Walryck vice-présidente de Bordeaux Métropole, en charge du développement durable et Valérie Martin, chef du service de la communication institutionnelle et de l’information des publics de l’ADEME.
Sommes-nous perdus ? Comment se projeter dans le monde d’après ? Qu’est ce qu’une transition ? Telle a été les premières questions posées par Vincent Baholet.
Pour cela, il faut définir ce qu’est une transition : une transition, c’est un passage vers la durabilité nous expliquait Vincent Baholet.
Anne Walryck a dressé un constat sur le plan écologique, numérique et sur le métier de communicant :
- Sur le plan écologique, on assiste à un réchauffement climatique sans pareil. Les températures aux Etats-Unis ont atteint des records cette année avec des journées sous plus de 50°C.
- Sur le plan numérique, on voit que des actes concrets commencent à se mettre en place, avec un très fort enjeu de partage
- La communication est un enjeu majeur du 21°s comme la santé. La communication donne du sens même si elle est souvent décriée. Il lui faut redonner du sens et de la valeur, c’est la responsabilité du communicant. Transmettre l’information n’est plus d’actualité. Il faut que le communicant sorte de son confort pour se rendre sur des terres inconnues, rencontrer des citoyens pour comprendre leurs habitudes, leurs envies et leurs besoins.
Pour finir cette introduction, Vincent Baholet a rappelé que l’évènement incontournable, la Cop 22, qui se déroulera à Marrakech du 7 au 18 Novembre avec les 17 objectifs de développement durable entrepris forment en soi une réelle rupture et une transition dans l’écologie.
11h15 – 1ère table ronde : « Quel territoire ? » avec comme intervenants, Julie Chabaud, responsable de la mission Agenda 21 du Conseil général de la Gironde, Arnau Queralt, Director of the Advisory Council for the Sustainable Development of Catalonia, Séverine Roullet, Directrice du développement durable des Laboratoires Pierre Fabre et Sebastien Keiff, chagé de mission au Conseil général de la Gironde.
Le territoire est le nouvel espace où s’élaborent la plupart des initiatives que ce soit la mise en place des nouvelles économies (collaborative, circulaire, de fonctionnalité…) ou de nouveaux modèles de consommation et de production. Comment inventer une nouvelle gouvernance de territoire ? Et comment les acteurs du territoire peuvent-ils coproduire une société résiliente, durable, axée sur le bien-être individuel et collectif ?
Avant toute chose, les acteurs du territoire doivent connaître la population et le territoire afin de mieux définir les objectifs du territoire, car chaque territoire a des objectifs différents. Ils doivent notamment s’inscrire dans une démarche d’échange avec le citoyen pour comprendre ses besoins et envies. On peut donner l’exemple de Sebastien Keiff, avec Bordeaux Agenda « Bien-être », où des questions sont posés aux citoyens pour comprendre quelles sont les facteurs à prendre en compte dans le développement du bien-être de soi sur leur territoire.
Les acteurs du territoire ne doivent pas imposer leur vision mais travailler ensemble, définir des objectifs communs avec tous les acteurs du territoire (Etat, entreprise, collectivités …). Il faut qu’ils informent les citoyens sur le territoire, qu’ils leurs fassent découvrir afin de leurs donner une sorte d’appartenance au territoire. Prenons l’exemple de Bordeaux : des citoyens bordelais n’ont jamais vu la mer alors que la force de la ville réside dans sa géolocalisation, proche de la mer Méditerranée. Il faut donc trouver des solutions pour répondre à ses problématiques.
De plus, les acteurs du territoire doivent se préoccuper de la nouvelle génération car ce sont eux les futurs protagonistes du territoire. Afin qu’ils reprennent au mieux le flambeau, les acteurs d’aujourd’hui ont l’obligation d’aller vers cette génération, de comprendre leurs envies, leurs besoins et surtout de trouver des solutions pour contre les problèmes d’emplois qui sont au centre des préoccupations de la jeune génération. Des actions concrètes commencent à émerger :
Par exemple, Séverine Roullet explique que le département du Tarn a pris la décision de créer des infrastructures scolaires pour rassurer les jeunes et dynamiser le territoire.
Arnau Queralt précise qu’en Catalogne, le projet mis en place est de faire des réunions entre des enfants, chercheurs et scientifiques pour que chacun puisse donner son avis sur la société, mieux la comprendre et avoir les clés d’une transition réussie.
Sebastien Keiff raconte qu’avec l’évènement, « La Fabrique du changement« , pendant trois jours, les jeunes construisent une vision de la société dans laquelle ils se projettent.
Les acteurs du territoire se sont rendus compte que la société est en avance et qu’elle se construit elle-même. Les décideurs sont du monde d’avant, il faudrait donc plus de jeunes et de femmes parmi ces décideurs pour insuffler une nouvelle dynamique dans le territoire.
Il faut aussi que les acteurs acceptent politiquement de faire des erreurs, pour pouvoir mieux rebondir. Exemple : le biocarburant, véritable danger social et environnemental.
En conclusion de cette première table ronde, Julie Clabaud a préconisé les changements a adopté chaque jour : les moyens de transports, manger équilibrer, être à l’écoute, partager sa vision et rester positif et optimiste malgré les difficultés.
12H00 – 2ème table ronde : « Une transition socialement juste ? » avec comme intervenant Vincent Baholet, Bernard Saincy, Président d’Innovation Sociale Conseil, Catherine Berthillier, Fondatrice-Présidente de Shamengo.
La transition écologique et énergétique va permettre de développer des emplois qui devront être enrichissant sur tous les plans. Mais elle fera aussi disparaître des emplois voir les révolutionner complètement demandant un fort renforcement de capacité et une formation initiale revue. Comment organiser la transition vers une économie pauvre en carbone qui soit juste socialement et porteuse d’un projet de société durable ?
D’un point de vue des entreprises, la RSE progresse. En 12 ans, nous sommes passés d’une communication de « greenwashing » à des actes concrets (ISO 26 000). Cependant, l’importance de la RSE dans les entreprises est très hétérogène. Le modèle d’entreprise est arrivé au bout de son cycle (Société Anonymes ou multinationale) et une nouvelle forme d’entrepreunariat est en train de se créer.
L’exemple le plus concret est Shamengo. Née en octobre 2011, la mission de Shamengo est de contribuer à rendre le monde meilleur. Pour cela, Shamengo crée des « smart villas », plus respectueuse de l’environnement et ancré au développement du bien-être du citoyen urbain.
La RSE devient la raison d’être de l’entreprise. Pourquoi ? Parce que les entreprises ont remarqué que la RSE est au centre des préoccupations de la génération Y. Et pour les attirer, ils n’ont d’autres choix que de s’inscrire dans une démarche nouvelle que ce soit la production ou les actions qu’elle entreprend pour la planète.
Mais alors comment ne laisser personne au bord de la route de la transition ?
Le système que l’on a créé, créé lui-même une exclusion sociale. Par exemple à Bordeaux, 17% de la population vivent sous le seuil de pauvreté et 7 à 8% ne sont pas loin de rentrer dans cette catégorie.
Ce qui emmène sur la question du chômage car l’émergence de la robotique va montrer une autre forme d’inégalité : certains salariés seront licenciés alors que d’autres non. La société Foxcon, groupe industriel taïwanais spécialisé dans la fabrication de produits électroniques a, par exemple, licencié 60 000 emplois sur 110 000. Amazon, lui, a commandé 30 000 robots qui remplaceront l’homme dans les années à venir.
Cependant, les formes d’égalités peuvent se trouver dans des domaines comme l’alimentation : en autonomie alimentaire, la ville de Bordeaux ne tiendrait qu’un jour, ce qui place tous les citoyens au même niveau de dépendance.
Il faut donc revenir aux fondamentaux et se poser les bonnes questions : celles-ci ne sont plus axées sur « Quel sera le monde de demain ? » mais plutôt sur « Comment impliqué tout le monde dans le monde de demain ? ».
14h15 – 3ème table-ronde : « Santé, Bien-être et alimentation : nouveau moteur de mobilisation ? ». Avec comme intervenants, Guillaume Marolleau, directeur marketing de Fleury-Michon, Elizabeth Pastore-Reiss, Vice-présidente de Greenflex, Anne Monloubou, Présidente de l’association « Les Amis de Supercoop » et Amaury Bessard, Directeur de la communication de l’ANIA.
Les études sur la consommation responsable réalisée par Ethicity démontre que le bien-être de ses proches est la première préoccupation des français et que la santé poursuit sa montée malgré le coût de la vie et la montée du chômage. 89% des francçais choisissent leurs aliments pour rester en bonne santé. Comment développer une offre correspondante, meilleure pour la santé et la planète et économiquement accessible ?
La société d’hier était basée sur un système de productivisme. Encore aujourd’hui, 40% de la production alimentaire mondiale ne sera jamais consommée. Depuis quelques années, 4 éléments ont eu un impact sur la conscience collective concernant l’alimentation. Guillaume Marolleau explique :
Les crises alimentaires (vache folle) et les scandales liés à l’alimentation (viande de cheval) ont permis une levée de conscience de la part des consommateurs. Le manque de transparence des industries agro-alimentaires et l’excés de marketing ont entraînés un ras-le-bol et pour finir les traitements médiatiques (Internet) et le changement du consommateur en consomm’acteur insufflé par le digital.
Il faut donc changer le modèle explique Amaury Bessard. Créer un modèle qui arrange tout le monde (entreprises, distributeurs et consommateurs) tout en restant compétitif au niveau européen. Et c’est là que réside la vraie difficulté, au niveau de la répartition de la valeur. Tout le monde doit payer un prix juste.
Il faut donc en amont éduquer le consommateur sur les produits, enrichi Guillaume Marolleau. C’est ce qu’est en train de réaliser l’entreprise Fleury-Michon. Ils ouvrent leurs usines aux consommateurs, journalistes, bloggeurs afin d’être le plus transparent possible. La transparence amène de la confiance et le consommateur sera plus à même d’acheter leurs produits car ils savent déjà comment le jambon a été créé et quelles produits ont été utilisés.
15h00 – 4ème table ronde « Co-responsabilité et partage de valeurs » avec comme intervenants Nathalie Bastianelli, fondatrice-présidente de We Belong Foundation, Carine Dartiguepeyrou, présidente de l’Observatoire des valeurs, Séverine Lecomte, Directrice de Heidi, agence de communication corporate et sociétale.
Une des sources de la complexité de notre monde vient de la diversité des systèmes de valeurs. Nos systèmes de représentation sont tellement divergents que nous avons du mal à « faire société » sur les questions sociales et environnementales. Si le constat global est partagé, les modes d’actions envisagés sont très différents. Ainsi le développement durable est vécu par certains comme un système de contraintes alors que d’autres le vivent comme la nouvelle bonne conscience de l’humanité et dénoncent le greenwashing des entreprises ou des politiques.
Nathalie Bastianelli, expatriée pendant 5 ans en Chine, témoigne de son expérience. La Chine est l’un des pays les plus pollués au monde construit sur un système de gouvernance centralisé. Les chinois n’ont pas encore conscience du potentiel qu’ils ont à faire bouger les choses mais la conscience collective se forme petit à petit grâce notamment à la plateforme « We Belong » dont le but est d’organisé des rencontres entre les entreprises du monde entier autour des enjeux du développement durable et de ses innovations.
Comme dit précédemment, le changement accroît les inégalités. Et pour orchestrer le changement, il faut repenser en premier l’éducation car le pilier du développement durable est la culture. Mais comment relier les gens qui n’ont pas les mêmes valeurs ?
3 solutions sont proposées :
- Inventer une nouvelle forme de monnaie
- La nature
- Le savoir intergénérationnelle
Les pays, la religion et les finances subissent aussi des transitions dû au numérique. Cela a pour conséquence la transformation de ces trois piliers et donne ainsi à une personne lambda du pouvoir pour changer les choses.
15h45 – 5ème table ronde : « Vers une société numérique ? » avec comme intervenants Jean Philippe Dreuille, directeur territoriale métropole, Enedis, Frédéric Rodriguez, Président de Greenflex, Emmanuel Soulias, DG d’Enercoop et Francis Jutand, DGA de l’Institut Mines Telecom.
La transition numérique bouleverse les modèles économiques, les modes de vies, de penser, de gouvernance et d’accès au savoir. Le tout à une vitesse telle qu’organisation ou individus ont du mal à s’adapter et à anticiper. Mais quelles voient se dessinent dans cette société numérique ?
La transition numérique est-elle un atout dans la transition énergétique ? Si l’on regarde du côté écologique, la réponse est non. Le coût en matières premières dans la fabrication de portable est cher. De plus, la transition numérique supprime des emplois et fait grimper le taux de chômage partout dans le monde.
Cependant, il ne faut pas retenir que les aspects négatifs. Si le capitalisme a rendu le citoyen plus égoïste, égocentrique et individuel, le numérique a permis lui de rapprocher les individus même éloignés à des milliers de kilomètres. Elle a aussi aidé à mobiliser une connaissance collective, à faire circuler l’information aussi vite que la vitesse de la lumière et surtout a orchestré une transition sociale exceptionnelle, celui de la prise du pouvoir du consommateur.
« Le numérique est un pharmakon » précise Francis Jutand. Elle est autant bénéfique que nuisible pour l’homme. Elle donne de moins en moins de libertés car elle est basée sur des choix (le « J’aime », « J’aime pas » que tout le monde utilise sur YouTube ou Facebook). Le numérique n’apporte pas ou peu de projet humain. Un exemple récent, la sortie de l’application qui fait fureur « Pokemon Go ». Constat de l’application : elle n’apporte aucune utilité à l’homme.
Mais alors comment faire du numérique un atout ?
Il faut repenser le numérique, le mettre au service de la personne. Plus qu’un simple outil de divertissement, le numérique doit être un outil d’enpowerment de la société civile, exemple, contrôler sa consommation d’énergie.
Ce n’est qu’en se servant du numérique à des fins économiques, écologiques et sociétales, au service de la personne avec une réelle utilité, que le numérique sera perçu comme un réel atout dans la transition énergétique.
En conclusion, se perdre ensemble pour mieux se retrouver est la meilleure façon trouver les solutions qui seront bénéfiques pour les générations futures. Ces tables rondes donneront lieu à un travail collaboratif qui se poursuivra pendant sur 18 mois et qui se soldera sur un livre de recommandations. L’idée est de voir comment faire pour que chacun puisse mieux appréhender ces transitions dans la société.
Maxime Lavandier
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