#MeTooPub : pourquoi il est temps que les choses changent

Publié le par chez APACOM. Modifié le

Le 4 mars 2019
#MeTooPub. 2 mois plus tard. Le temps de l’action.

Le 4 mars 2019, le journal Le Monde lâchait une bombe sur le monde des agences de communication. Après le cinéma et le journalisme, nous aussi avions enfin droit à notre #MeToo. Avec tous les ingrédients du genre réunis pour un storytelling réussi : harcèlement, sexisme ordinaire, culture des Boys’ Clubs. 
Au royaume des agences aussi, il y a quelque chose de pourri.

Et au quotidien, ça n’a rien de shakespearien.
Anatomie d’un échange en open space.
Du vécu d’agence cool dans le texte :
– Lui, directeur de clientèle : « Il te fait de beaux seins, ce décolleté. »
– Elle, chef de publicité : pointe d’appréhension, rire indigné (boys will be boys).
– Moi, bureau d’en face : sourcil relevé, silence gêné.

Variations sur le même thème au fil des jours. L’anecdotique ritualisé.
Seins. Cul. Jambes. (lui)
Indignation. Lassitude. Résignation. (elle)
Gêne. Indifférence. Complicité. (moi)
Comique de répétition. Sexisme de routine. Violence quotidienne. (lui, lui, lui, et moi, et moi, et moi).
Silence. (nous)

Le 4 mars 2019, c’est le silence qui a été rompu.
Sur un secret de famille que tout le monde connaissait déjà mais dont personne ne parlait. (t’es pas au courant ?) Dont on se chuchotait parfois les détails croustillants dans la cuisine, avant le repas du dimanche. (ah oui quand même !) Qu’on ne se jetait jamais au visage parce que la famille c’est précieux et les secrets, même un peu honteux, ça se respecte. (et les moutons seront bien gardés)

Et puis, serait-ce trop vous demander, Mesdames, de faire preuve d’un peu de second degré quand votre talentueux directeur de création, votre audacieux directeur général ou votre voisin de bureau rigolus vous font un compliment un peu foireux ?
Allez-vous mettre au rancart 50 ans de jeu de la séduction en agence en nous jetant au visage votre féminisme puritain à chaque petit écart de langage ?
Voyez-cela comme autant de timides et maladroits hommages à votre irrésistible féminité. Et puis, on est dans la com’, merde ! Entre mecs aussi, on se met des mains aux fesses !
C’est pour dire, c’est pour de rire.
Management bienveillant, bien-être au travail et innocence garantis.
Courage. (elles)

Le 4 mars 2019, c’est le courage que l’on célébrait.
Le courage de ces femmes qui osent révéler des comportements inacceptables et nommer leurs agresseurs.
Non, une blague salace n’a rien à voir avec le jeu de la séduction.
Et, oui, la répéter, c’est harceler.
2 ans de prison. 30 000 euros d’amendes.
Et donc ?
Et bim ? Let’s name & shame, c’est ça ?

Non.
Enfin, je ne crois pas.
Peut-être mais pas que.
Il est en revanche de notre responsabilité collective de faire en sorte que plus rien ne soit comme avant.
Action. (tous)

Ok, mais on fait quoi ?
On s’applique nos propres recommandations !
Celles que l’on fait à nos clients en matière de lutte contre le sexisme et la masculinité toxique, de représentation de la femme et d’égalité homme-femme.
The best a man can be. Like a girl. It’s only crazy until you do it.
Si c’est bon pour nos clients, c’est sûrement bon pour nous.

Quelques pistes (avec des si) :

Et si l’on commençait par arrêter de nier les réalités ?
La culture du viol est un fait social incontestable. Autrement dit, un phénomène culturel régulier et collectif. Comme tous les secteurs, le milieu de la communication en est imprégné. Il est temps que les choses changent.

Et si l’on arrêtait aussi de se dire que ‘il n’y a pas de ça chez nous’ ?
Alors, oui, #NotAllMen, mais le harcèlement et le sexisme ne sont pas le symptôme de la décadence des patrons des agences de communication parisiennes.
Tout le monde est concerné, femmes, hommes, lesbiennes, gays, hétéros, etc.
Toutes les organisations sont concernées, studios d’exé locaux, petites agences de province, grandes agences régionales, hot shops Parisiennes, associations de professionnels, écoles post-bac, instituts supérieurs de formation au marketing, à la communication ou à la créativité publicitaire, etc.
Il est temps que les choses changent, là-bas et ailleurs.
Que l’on soit à Paris, Bordeaux, Poitiers, Pau ou Pointe-à-Pitre.

Et si l’on accueillait la parole des victimes ?
Accompagner, écouter, accorder du crédit aux victimes, dénoncer.
Dresser un état des lieux, sensibiliser aux stéréotypes sexistes, former hommes et femmes à reconnaître le harcèlement, développer un code de bonne conduite. Éduquer les professionnels de la communication et ceux en devenir à recueillir et libérer cette parole.
Il est temps de faire preuve d’humanité et de ne plus laisser les agresseurs agir sans intervenir. #NeRienLaisserPasser

Et si l’APACOM donnait une nouvelle preuve de la générosité de son collectif ?
Ou quand un lieu de rassemblement et de rayonnement d’une communication durable devient une force d’influence saine et souhaitable en faveur du droit des femmes.
Et pour cela, l’APACOM doit pouvoir compter sur ses adhérents bénévoles.
Il est temps que nous mettions à jour le sens de notre engagement individuel en son sein pour faire bouger les choses. Me too.

Et si l’on dépassait le seul sujet du harcèlement pour questionner la répartition du pouvoir ?
Dépasser le stade de l’audit, de la recommandation et des effets de cosmétique.
Car ce ne serait pas suffisant pour 53% des salarié.e.s des agences de communication. 53% de femmes (source AACC) qui subissent le patriarcat historique d’un secteur qui entretient les stéréotypes sexistes en termes de représentation aux postes-clés.

Il est temps d’instaurer la parité à tous les niveaux de l’entreprise de communication.

Pour favoriser un renouvellement en profondeur de la culture agence.

Et que les échanges en open space ne soient plus comme avant.

– Elle, CEO : « Elle est sympa ta chemise. »
– Lui, directeur Commercial : « Merci. »
– Moi, bureau d’en face : « Boring. »
Moins cool, certes. Mais tellement plus humain.

Xavier Blandin

Sources – pour mieux comprendre et aller plus loin:

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