L’intelligence collective au service de la performance

Interview de Jacques Grizeaud, co-fondateur du concept de management biologique.

 

Fils d’industriel, Jacques Grizeaud a suivi une formation spécialisée en botanique et biologie végétale. Il fonde en 1989 la société de conseil en organisation et logistique « Espace Aventures », spécialisée dans la convention de plein air et les opérations de team building. Depuis plus de vingt ans, il organise des évènements d’incentive et d’outdoor management. Il crée en 1997 la marque Osphère en collaboration avec Pascal Gayet, consultant et ancien chercheur chez EDF. Coachs d’équipes et formateurs, membres de SOL France, ils ont développé pendant dix ans des outils, des méthodes et des produits originaux de management en milieu décadré pour des dizaines de grands groupes internationaux.

Fruit de leur collaboration, le livre « Le management biologique », édité en 2008, présente les concepts clés du management biologique.  Son but est de présenter une démarche alternative, globale et efficace, qui permet de concilier l’humain, l’éthique et l’économique.

 

Dans votre livre, vous expliquez que l’entreprise est un organisme biologique constitué de cellules indépendantes qui concourent ensemble à son développement et à sa survie. Le management au service de l’intelligence collective n’est pas un concept nouveau. Quelle est concrètement votre valeur ajoutée ?

C’est tout l’inverse ! L’intelligence collective est au service du management. Notre valeur ajoutée c’est d’amener les gens à regarder l’entreprise comme un système vivant et non mécanique. Notre première démarche est de faire comprendre cela auprès du dirigeant afin qu’il puisse changer son attitude pour se mettre en ressource du système qu’il a à manager.

 

Comment vous définissez-vous ? Consultant ? Formateur ? Coach ?

Je ne sais pas vraiment, ou plutôt, je n’ai rien de précis à vendre comme peut le faire un consultant ou un formateur … Un de nos principaux clients c’est amusé un jour à qualifier le travail que nous avions réalisé ensemble. Sa conclusion fut que j’avais joué le rôle d’un « attracteur étrange », tant les chemins explorés paraissaient improbables au départ, autant que le résultat du cheminement réalisé depuis. « Attracteur étrange » me convient bien, autant qu’animateur/facilitateur ou architecte en environnement cognitif.

 

Quels sont le rôle et les enjeux de la communication dans votre approche managériale ?

Un des fondamentaux du management biologique est la communication. « Sans communication, la vie est impossible » nous dit Joël de Rosnay. C’est l’élément le plus important du fonctionnement de tout système vivant. Là, je parle de la communication interpersonnelle, celle qui permet à chacun de comprendre son rôle dans la relation. Dans le cas de la communication commerciale et institutionnelle, celles-ci n’ont de sens que si elles sont porteuses de vérité et de valeurs à partager. Dans le monde en mutation tel que nous le vivons aujourd’hui, la recherche de sens devient un pré-requis pour nombre de consommateurs et de citoyens. Je pense sincèrement que nous sommes à un tournant entre un monde de consommation à outrance qui finit et un monde en devenir en recherche de responsabilités. Faire du profit est important mais plus à n’importe quel prix. L’enjeu du futur pour toutes les entreprises est de faire du profit responsable sinon elles disparaîtront naturellement, leurs clients étant de plus en plus sensibles à l’éthique. Je pense que la communication doit être plus exigeante et répondre d’avantage à la réalité du monde. Elle doit être au service du sens, du bon sens et des citoyens et non de ceux qui compromettent l’avenir de la planète.

 

Nous vivons une période de crise économique où l’humain est fragilisé au profit de la rentabilité. N’est-ce pas contradictoire ?

Je dirais plutôt l’inverse. Nous pouvons regarder les choses autrement. Nous vivons une période de crise, ou plus exactement de chaos, où la rentabilité à outrance et à court terme est fragilisée au profit d’une économie laissant plus de place à l’humain … Rétrospectivement, la situation que nous vivons actuellement était prévu depuis longtemps par nombres d’analystes, d’économistes de renom, de philosophes, de prospectivistes. Mais, à l’image des trois singes de la mythologie asiatique, nous n’avons rien voulu voir, entendre ou dire ! Et, à force de faire toujours la même chose, nous ne pouvions finalement obtenir et subir cette crise.

Pour moi, cette crise nous fait passer d’un cycle finissant à un cycle émergent. Nous sommes en train de vivre un changement qui fait peur à la majorité, là où d’autres y voient une opportunité. Dans nos cultures occidentales et nos systèmes d’éducation, nous appréhendons le changement comme une transition qui a pour conséquence la perte de quelque chose. Nous savons ce que nous pouvons perdre mais nous avons beaucoup de mal à imaginer ce que nous pouvons gagner. Pourtant, la vie est en perpétuel changement et il n’y a rien de plus constant que le changement. Nous pouvons aussi la regarder avec d’autres lunettes, changer nos cartes mentales. C’est à mon avis une fabuleuse opportunité de renouer avec le dialogue là où nous avions créé un monde du « chacun pour soi ». C’est aussi l’occasion pour retrouver la confiance dans les idées en lâchant prise sur le connu, et ainsi explorer tous les possibles pour laisser advenir le futur. L’homme est un créatif, de tout temps il a su faire face aux crises et s’adapter à son environnement. La technologie et la société de surconsommation nous ont détournés de notre savoir-être, nous faisant croire, que pour faire face à nos maux, il nous suffisait d’acheter des solutions toutes faites… des médicaments. Alors qu’en fait, les solutions sont en nous et qu’il suffit d’oser y croire et d’avoir confiance en nos propres ressources, individuellement et collectivement, pour franchir les obstacles naturels que la vie nous donne à vivre.

Finalement cette crise annonce un changement de cycle dans la vie de l’espèce humaine, faisons en sorte de ne pas renouveler nos erreurs et de réussir la transition … Pour les générations futures.

 

Propos recueillis par Catherine Sarnow

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