C’est un Matin de l’APACOM spécial élection présidentielle qui s’est tenu ce mardi 11 janvier, à juste trois mois du premier tour, dans le bel espace cosy d’Autre Ambiance. Guillaume Petit et Sandra Messibah accueillaient deux représentants de nos médias régionaux : Yves Maugue, rédacteur en chef de France Bleu Gironde, et Coralie Morin, coordinatrice des informations générales de Sud Ouest. A l’échelle locale, quel rôle la presse souhaite-t-elle tenir, comment s’organise-t-elle et quelles contraintes rencontre-t-elle dans le contexte actuel ?
De gros dispositifs
Côté Sud Ouest, la machine est en marche depuis déjà plusieurs mois et mobilise toute la rédaction, avec l’appui des journalistes politiques, y compris du bureau parisien. La ligne éditoriale a été décidée en équipe : que proposer aux audiences, prioritairement numériques ?
C’est un important dispositif qui a été mis en place avec pour fil conducteur la proximité, en allant sonder espoirs et attentes des électeurs au plus près des territoires. Sud Ouest propose une série « Par ici la présidentielle », des décryptages, des reportages dans toute la France… sans oublier le reste de l’actualité. Le média a également mis en place des espaces d’expression citoyens, avec une newsletter « Parole Citoyenne », un panel de jeunes de 18 à 30 ans ou encore un espace de débat en ligne.
Côté France Bleu Gironde, l’enjeu consiste à couvrir l’élection au niveau local, une partie importante de l’actualité étant traitée par le national de Radio France. La station peut ainsi profiter des sujets réalisés par ses confrères, comme la grande consultation Ma France 2022 lancée depuis octobre et qui a déjà recueilli près de 500 000 contributions. Une source précieuse sur les tendances du moment. « Mais nous ne voulons pas non plus tomber dans le « tout » présidentielle » précise Yves Maugue. Le reste de l’actualité garde toute sa place.
Un éclairage local
Pour chacun, les sujets doivent être couverts avec un angle de proximité, en s’attachant aux thématiques qui concernent les habitants de la région. France Bleu Gironde accueille les émissions délocalisées du national, mais suit également les candidats en déplacement pour leur campagne, reçoit des invités politiques, monte des débats, en interrogeant sur les sujets locaux comme la LGV Bordeaux-Toulouse. De nombreux candidats se positionnent sur des thématiques territoriales… mais certains se contentent de faire l’aller-retour Paris-Bordeaux dans la journée ! Il faut alors les convaincre de l’intérêt d’être présents pour la matinale.
Sud Ouest également cherche à coller au plus près aux attentes de ses lecteurs. D’autant que, malgré un certain désintérêt du politique actuellement, l’élection présidentielle continue d’intéresser énormément les lecteurs. Et ils ne manquent pas de s’exprimer…
Un contexte particulièrement tendu
Si les médias prennent au sérieux leur rôle de mobilisation citoyenne, en relayant les campagnes sur le vote citoyen ou par des articles pédagogiques, ils doivent en parallèle se confronter à des réactions nombreuses et virulentes de leurs audiences. Depuis les crises des Gilets Jaunes puis de la Covid-19, le besoin de s’informer mais aussi de s’exprimer est croissant. Les critiques, plus ou moins fondées, pleuvent.
« On sent une colère » note Coralie Morin qui cite l’exemple d’une infographie publiée par Sud Ouest mentionnant la date du début du ramadan et qui a déclenché les foudres. « La presse est cataloguée comme relais du pouvoir par une frange de la population » décrypte Yves Maugue qui se désole que les journalistes puissent aujourd’hui être agressés oralement voire physiquement.
Autre sujet de tension : la tentation de l’audience. « L’épisode Eric Zemmour a fait partir les choses follement, rappelle Coralie Morin. Mais nous avons une responsabilité, nous avons attendu qu’il soit candidat et qu’il y ait un fait d’actualité pour en parler». Sur les réseaux sociaux, la liberté d’expression est reine… avec modération. Une modération sous-traitée, les journalistes pouvant eux aussi défendre leurs points de vue.
Quant aux sondages, la tendance est à la méfiance, en privilégiant des fourchettes plutôt que des chiffres bruts. Une adaptation nécessaire aux récentes expériences vécues.
Marie Dubois
* La commission Matins de l’APACOM organise des rencontres avec les médias de la région. Elle est animée par Anne-Laure Marin, Sandra Messibah et Guillaume Petit. L’ISCOM Bordeaux, partenaire de la commission, offre le petit déjeuner aux participants.